Reservoir Dogs [PC]

Reservoir Dogs est un film de Quentin Tarantino, devenu tellement culte que Volatile Games a décidé d’en faire un jeu. La tâche n’étant pas simple (80% du film est tourné dans un hangar faute de budget), vont-ils réussir leur adaptation ?

La première chose qui frappe dans ce jeu, ce sont les personnages. Où sont passés Harvey Keitel, Steve Buscemi ou Lawrence Tierney ? Hé bien sachez qu’à l’exception de Michael Madsen (Mr blonde) qui a aussi prêté sa voix, Eidos n’a pas réussi à obtenir le droit d’image des différents acteurs.
Est-ce que ça pose un gros problème, mis à part l’aspect fidélité et le fait que les personnages seront forcement inférieurs en charisme à ceux du film ? On a droit à quelques personnages convaincants comme Mr Pink ou Mr Orange cadrant bien avec les personnages mais d’autres comme Mr White perdent tout leur charisme. La société a par contre réussi à récupérer toute la BO du film, mais j’y reviendrais.

Donc je disais, comment faire un jeu d’action quand il est tiré d’un film où les scènes de ce type se comptent sur les doigts d’une main ? Hé bien, il suffit d’inventer un niveau pour chaque scène abrégée ou manquante. Ce qui compte la séparation de tous les personnages lors de l’attaque de la banque, le moment où Mr White ramène Mr Orange, blessé, à l’entrepôt, ou encore une course poursuite avec des voitures de police (ah bon, il se faisait poursuivre dans le film ?). Au final, avec des niveaux alternant conduite et TPS on arrive bien jusqu’à la fin du jeu comme ça.

Si le scénario n’est pas très bien mis en valeur, l’esprit du film, lui, est bien retranscrit que ce soit par les dialogues et textes rajoutés, la mise en scène ou la réalisation.

Premièrement, selon la façon dont vous allez effectuer votre mission, le jeu va vous attribuer un classement différent.
Soit vous agissez comme un vrai professionnel, en tuant le moins de monde possible, vous vous servez d’otages et jouez intelligemment et vous aurez le rang correspondant. Soit vous dézinguez toutes les personnes qui passent, vous vous servez des otages seulement comme boucliers humains et vous vous cognez que l’alarme soit déclenchée et que des renforts arrivent, dans ce cas vous serez catalogué de psychopathe. A noter qu’il y a également un juste milieu : le rang criminel.
Même si le jeu vous autorise quelques écarts, il faudrait donc mieux agir pour le mieux, votre rang final déterminera ainsi la fin que vous aurez (ne vous attendez pas à un truc de fou mais sachez qu’il y a 3 fins différentes).

Concernant la partie TPS, c’est assez complet. Vous pouvez vous accroupir, vous mettre à couvert, viser plus précisément, verrouiller certaines portes pour qu’on ne vous suive pas, vous avez les armes classiques (fusil à pompe, sniper, mitrailleuse, etc.), plusieurs sortes de 9mm et de grenades (aveuglantes, fumigènes). Vous aurez également droit à un bouclier de SWAT vers la fin du jeu, mais même comme ça on ne peut s’empêcher de penser qu’une plus grande diversité de l’armement aurait été un plus agréable, voir nécessaire.

Heureusement intervient le système d’otages dont je parlais plus tôt, qui est assez développé mais possède quelques défauts.
Alors comment ça se passe : imaginons, vous venez de débarquer dans une nouvelle zone, un civil vous voit et mince, il prends conscience de vos armes et pris de panique, il court sonner l’alarme (car vous pouvez aussi les rengainer, ça il faut le savoir).
Vous décidez alors de lui dire de ne plus bouger (car sinon il sera truffé de plomb) grâce à la touche menace. Une fois qu’il lève les mains, vous avez plusieurs choix : soit vous continuez de le viser et vous pouvez choisir de le diriger dans la direction que vous voulez en donnant des petits coups avec la souris (et pouvez lui demander d’ouvrir une porte ou d’activer certaines choses mais ça reste assez anecdotique dans ces situations), soit vous pouvez le conduire jusqu’à un mur et lui demander de s’accroupir face à vous. Quand un personnage est dans cette position, il est dit neutralisé, vous pourrez partir à l’autre bout du niveau, le personnage ne bougera pas d’un poil que ce soit un civil ou un flic avec une arme juste à coté de lui, c’est assez important à retenir puisque si le personnage est debout, les mains levé et que vous tournez la tête, il est foutu de se tailler en courant ou de reprendre son arme, prudence donc.

Là où ça va encore un peu plus loin c’est que l’on peut emmener un personnage avec nous en tant qu’otage. Si les flics vous voient avec lui il ne tireront pas, sauf si vous ne leur faites pas face. Et qu’est ce qu’ils vont donc essayer de faire ? Vous tourner autour pour essayer de vous avoir, à vous de les diriger dans la bonne direction pour qu’aucun pépin n’arrive (d’ailleurs une vue arrière est disponible pour vous aider à manœuvrer).


A gauche : Si les otages sont trop blessés, il ne vous obéiront plus

Si certains gardes cèdent dés la menace, la plupart des flics ne lâcheront pas leurs armes facilement, doutant de vos véritables intentions. Prouvez leur que vous n’êtes pas là pour rigoler, n’hésitez pas à frapper un otage pour qu’ils lâchent leurs armes et neutralisez les le plus vite possible.
Les otages disposent de leur propre barre de vie, celle-ci diminue, bien sûr, si vous les frappez (ce qui peut vous mettre dans des situations délicates si vous avez plusieurs personnes armées en face de vous et que l’otage n’a presque plus de vie) mais aussi à force de le traîner dans tout le niveau. Si sa barre de vie s’épuise complètement de cette façon, soit il s’écroulera de fatigue une fois relâché, soit il choisira de ne plus avoir confiance et n’obéira plus à aucun de vos ordres. Cela vous oblige à changer constamment d’otage pour en avoir toujours un en bonne santé.


A droite : J’aime avoir la classe avant d’effectuer mon spécial (scène différente pour chaque perso) (notez le détail en haut a gauche qui prouve que la version PC n’est qu’un portage)

Les otages peuvent aussi vous donner les digicodes de sécurité (attention à avoir le bon code dans ce cas là) ou ouvrir des coffres. La seule autre manière d’ouvrir une porte condamnée par un dispositif électrique est de tirer dessus ce qui a pour effet de déclencher l’alarme.
La dernière subtilité de ces phases est la présence d’un mode adrénaline, une fois que la jauge correspondante est pleine et que vous l’activez soit :
– Vous avez un otage et vous lui explosez méchamment la gueule ce qui a pour effet de neutraliser toutes les personnes de la zone
– Vous n’avez pas d’otage et le temps se ralentit pour vous permettre de plomber toutes les personnes de la zone, les balles arrivent toutes en même temps à la fin de l’attaque.
A noter que les animations de ces deux attaques varient selon le personnage que vous incarnez.

Les quelques défauts que j’ai pu souligner : quand vous frappez un otage seuls les flics faisant directement face à vous seront affectés, on est souvent obligé de viser différentes personnes et de frapper l’otage plusieurs fois alors que tout ce joli monde est devant vous.
Les personnages qui restent indéfiniment devant un mur ou un groupe de SWAT qui posent leurs armes alors que vous avez explosé l’otage devant eux ça fait pas très réaliste. Mais bon, parler de logique et de jeu vidéo c’est un peu contradictoire, surtout quand on pense que le jeu serait moins bon sans ça.

Les phases en voiture restent assez classiques mais terriblement efficaces. La maniabilité répond bien, on a un frein à main et la barre d’adrénaline sert de turbo, on peut également viser et tirer comme dans un GTA.
On pourra également trouver des tremplins et autres qui proposeront des ralentis à la Driver lors de la surélévation de la voiture. Les objectifs de ces phases sont très divers : courses, protection d’une autre voiture, parcours en temps limité, etc. On s’ennuie rarement durant ces phases d’autant plus que contrairement à celles de TPS, un peu trop faciles quand on a saisi les mécaniques de jeu, les phases de conduite demandent à être effectuées plusieurs fois avant d’être réussies.

Et le gros plus de ces phases, c’est la radio. Car grâce à deux boutons on peut switcher facilement entre les différentes musiques du jeu, qui sont aussi écoutables dans le menu principal ou dans différents postes de radio disséminés dans les niveaux (dommage qu’il n’y ait pas de sound test). Et alors là : Little Green Bag, Stuck in the Middle With You, Hooked on a Feeling, Coconut… On se retrouve avec le super son des Seventies, au moins voila une reprise qui ne déçoit pas. Pour les doublages, c’est assez correct et les dialogues sont légion même lors des missions.


A droite : Votre personnage perd du sang s’il est blessé

Musicalement, ça passe. Par contre graphiquement, c’est assez moche, il ne faut pas le cacher et le portage PS2 ne fait pas du bien. Les textures sont moches et peu détaillées. Les cinématiques, bien qu’étant pas trop mal faites sont floues. Ça aurait pu passer il y a cinq ans mais quand on pense que Bioshock sort un peu moins d’un an plus tard ça fait mal.
A contrario, les niveaux sont bien construits et on a droit à plusieurs embranchements dans ceux-ci, j’ai rarement eu l’impression d’avoir affaire à un jeu linéaire.

Pour la durée de vie, ça fait mal puisqu’on n’a droit qu’à une petite dizaine d’heures pour finir le jeu mais compte tenu de ce qu’il nous propose ou de ce sur quoi il s’appuie pour nous faire jouer, il aurait été difficile de faire plus.
Chose aberrante : le jeu ne propose pas de mode difficile, même si vous le finissez vous restez cantonnés à facile et normal. La rejouabilité s’articule donc sur des cheats codes débloqués une fois le jeu fini, les deux autres fins à obtenir, les documents à trouver dans les niveaux (assez faciles à trouver tout de même) permettant de débloquer des galeries d’artworks composées uniquement de dessins des niveaux en noir et blanc. Ça reste assez famélique tout de même.

Les avis peuvent être partagés sur ce Reservoir Dogs. En tant qu’adaptation c’est moyen puisque les acteurs originaux n’ont pas été modélisés et doublés (sauf un). Le scenario est loin d’être un complément au film. Reste l’ambiance du film, respectée que ce soit dans les idées de gameplay, dans les différentes scènes ou avec la BO.
En tant que jeu, il possède de bonnes phases de conduite mais en tant que TPS, bien qu’ayant un très bon système de gestion d’otages il peine à se renouveler et si très peu de signes de redondance se manifestent c’est parce qu’il se finit très vite. Clairement du vol à sa sortie, aujourd’hui la baisse de son prix lui a permis d’obtenir le véritable rang qu’il mérite : celui de petit jeu sympathique.

 

Développeur : Volatile Games
Date de sortie : 2006
Article publié originellement sur Gamekult le 26/06/2013