Donkey Kong [GB]

Donkey Kong est l’un des jeux d’arcade les plus importants de l’histoire du jeu vidéo. A l’époque où le marché est envahi par des shoot them up et des casse-briques, il s’impose comme l’un des premiers jeux de plates-formes et connaîtra un grand succès dans le monde entier. En 1983, la première adaptation sur Famicom (bien que possédant un niveau de moins) démontrera la puissance de la console qui égalait alors l’arcade de l’époque.
Du coup lorsque l’on tombe sur ce jeu Game Boy sobrement intitulé Donkey Kong et qu’on essaye ses 4 premiers niveaux repris du jeu original on peut se dire qu’il ne s’agit que d’un bête portage ce qui serait une énorme erreur : une fois les premiers niveaux terminés, une première carte du monde se débloque, plus d’une centaine de niveaux d’action/réflexion attendent le joueur avec une fonction de sauvegarde lui permettant de reprendre sa progression après avoir éteint la console. Donkey Kong sur Game Boy peut être considéré comme l’épisode zéro de la saga Mario vs. Donkey Kong qui officiera plus tard sur GBA, DS et 3DS.

La maniabilité de base est la même que celle de Donkey Kong arcade, donc on oublie la notion d’élan et les sauts où on contrôle le personnage (notions instaurées par Super Mario Bros.) pour se retrouver avec un personnage qui se déplace lentement, toujours à la même vitesse et effectuant des sauts en cloches.
Néanmoins Mario dans la scène d’introduction du jeu nous montre que le gameplay est bien plus évolué que dans le jeu où il fit sa première apparition, en en tirant parti dès le début du jeu on se rend compte qu’il est possible de terminer les premiers niveaux provenant de Donkey Kong arcade en une poignée de secondes.


Première image : Mario présente les nouveaux mouvements dans l’intro du jeu

En courant dans une direction et en appuyant rapidement sur la touche de direction opposée plus la touche de saut, il est possible de faire un grand saut arrière. Ce mouvement sera repris 2 ans plus tard dans Super Mario 64 et sera présent dans tous les Super Mario suivants.
En appuyant sur Bas plus la touche de saut, Mario va se mettre à marcher sur ses mains, ce qui va le rendre plus lent mais ce qui va aussi lui permettre de devenir insensible à toutes les chutes d’objets. En réappuyant sur la touche de saut, Mario effectuera un grand saut.
En appuyant sur la touche de saut au bon moment après un grand saut, Mario effectuera un second grand saut qu’il signera d’un petit geste athlétique, un mouvement que l’on peut apparenter au triple saut de Super Mario 64.
Ce grand nombre de moyens de faire des grands sauts et donc d’évoluer plus vite verticalement dans les niveaux permet de pallier au gameplay très rigide du premier Donkey Kong tout en le reprenant à l’identique. On notera également que c’est en travaillant avec un gameplay possédant des limitations que Nintendo trouvera certains mouvements offrant l’excellente liberté de mouvements de la série Super Mario à partir de l’épisode 64.
 
A l’instar de Super Mario Bros. 2, en appuyant sur B au-dessus d’un objet ou de certains ennemis, il est possible de s’en saisir et de les lancer, ce qui peut avoir différentes fonctions comme de se créer des plates-formes ou d’attaquer d’autres ennemis.
Enfin, la gravité est prise en compte dans le jeu. Lorsque Mario tombe, son corps va de plus en plus basculer jusqu’à finir la tête en bas. S’il touche le sol pendant que son corps est de côté alors Mario s’en sortira juste en faisant une roulade (ce qui peut être toutefois fatal s’il atterrit dans des piques en terminant sa roulade au sol). Toucher le sol pendant qu’il a la tête en bas est fatal pour le héros comme on peut l’imaginer. Cela offre au jeu un réalisme agréable qui demande toutefois au joueur de faire attention dans tout ce qu’il fait, le joueur peut donc évoluer rapidement verticalement mais ce n’est pas sans risque.
 
Cependant comme on peut l’imaginer de la part de Nintendo qui était la référence du ludisme surtout à cette époque, cela ne s’arrête pas là et le jeu se renouvelle continuellement en apportant de nouvelles mécaniques de jeu grâce à l’environnement changeant.
On aura par exemple : des items permettant de faire apparaître des ponts et échelles là où on le désire durant une courte période de temps ; des barres d’athlétismes permettant de faire sauter plus haut Mario ; des ennemis marchants sur les murs qui pourront servir à Mario de plates-formes ; des lianes qui auront les mêmes propriétés que celles de Donkey Kong Jr. ; des champignons rendant Mario tout petit, lui permettant de passer dans des endroits inaccessibles mais le rendant aussi plus vulnérable ; des blocs que l’on ne pourra casser qu’avec le marteau ; des ennemis de feu faisant fondre les blocs de glace sur lesquels ils traverseront ; des icebergs s’enfonçant dans l’eau de plus en plus à mesure qu’on y reste…
Toutes ces mécaniques de jeu seront expliquées au fur et à mesure à travers de courtes cutscenes entièrement muettes et très drôles. Nintendo est à la pointe du didactisme et nous apprend en nous amusant, d’un bout à l’autre, ce jeu est un concentré de fun.
 
Pour terminer sur l’aspect narratif, parlons un peu de l’histoire du jeu. Celle-ci est la même que dans Donkey Kong arcade : la copine de Mario, Pauline (à ne pas confondre avec Peach) a été enlevée par Donkey Kong (gorille parodiant King Kong) et Mario doit la sauver. Dans Donkey Kong arcade, le gorille était rapidement mis KO, ici la poursuite sera beaucoup plus longue et se fera sur un tour du monde permettant d’exhiber des décors, niveaux et ennemis variés. Le jeu a l’avantage de ressortir un personnage Nintendo oublié (Pauline) qui fera de nombreuses apparitions dans les opus suivants de la série Mario vs. Donkey Kong. A un certain stade du jeu, Donkey Kong Jr viendra prêter main forte à son père pour combattre Mario, pimentant les parties par exemple en changeant aléatoirement le sens des tapis roulants. De nombreux clins d’œils aux autres Donkey Kong sont présents.
 
On peut distinguer trois phases de jeu : une plus orientée réflexion consistant à trouver et à déplacer une clé cachée dans le niveau pour ouvrir une porte fermée qui permet de finir le niveau et deux plus orientées action où l’on doit combattre Donkey Kong soit en arrivant jusqu’à lui comme dans le jeu originel soit en lui lançant des objets dessus. Le joueur devant enchaîner un certain nombres de phases de réflexion avant de faire une phase d’action.
Dans chaque niveau de réflexion, on trouve trois objets bonus qui sont ceux laissés par Pauline dans son enlèvement : un parapluie, un sac à main et un chapeau. Si le joueur trouve les 3 objets d’un niveau, il a accès à un des deux mini-jeux du jeu : une machine à sous et une roulette, qui lui permettront de gagner des vies. Essayer d’avoir tous les objets bonus dans chaque niveau est un défi très agréable qui demande parfois pas mal de réflexion.

Le jeu est très beau pour un jeu Game Boy, très détaillé et lisible, avec pas mal d’animations pour Mario et ses ennemis, je mentionne une nouvelle fois l’apport des cutscenes très bien conçues et très fréquentes. On trouve également de nombreuses musiques, chaque monde en comportant son lot, certaines étant très agréables et pouvant rester en tête, on appréciera également le thème de Donkey Kong jouant avant chaque confrontation avec le colosse.

Il faudra à peu près 5 heures à un joueur pas trop nul pour terminer le jeu, ce qui est honorable pour un jeu Game Boy. La fonction de sauvegarde est très utile et permet de jouer au jeu par courtes sessions, ce qui est l’idéal pour une utilisation nomade. Les meilleurs temps pour tous les niveaux sont enregistrés, ce qui apporte beaucoup à la rejouabilité. Il est possible de trouver le jeu un poil trop facile étant donné que de nombreuses vies sont donnés au joueur par le biais des mini-jeux et des combats contre les boss (c’est le syndrome du jeu qu’on termine avec presque une centaine de vies en stock), cependant les morts sont tout de même assez fréquentes et les derniers niveaux du jeu ont clairement pour objectif de faire perdre toutes les vies accumulées jusque-là.

Donkey Kong Game Boy est donc une franche réussite. Le jeu reprend le gameplay de Donkey Kong arcade tout en lui ajoutant des évolutions qui le libèrent de sa rigidité et lui donnent une grande liberté d’action, il ajoute aussi au jeu original une bonne centaine de niveaux d’action mais surtout de réflexion dont on ne décroche pas jusqu’à la fin grâce à leur grande variété. Seul petit défaut du jeu, comme pour un Super Mario Land ou un Kirby’s Dream Land on pourra lui reprocher le fait d’être un peu trop facile pour un adulte. Cependant qu’on ne s’y trompe pas, Nintendo grâce à son savoir-faire incroyable dans le domaine ludique nous signe ici un des grands classiques de l’époque, indémodable et totalement indispensable sur le support.

Développeur : Nintendo
Date de sortie : fin 1994